Louons et rendons Gloire à l’Eternel, Le Tout-Puissant ALLAH, Le Clément et Miséricordieux qui, cette fois-ci encore, a préservé la Guinée du démon de la guerre civile.
Le coup d’état intervenu en Guinée le 5 septembre dernier est un évènement qui n’a pas été souhaité. Toutefois, il offre au pays l’occasion de repartir d’un bon pied. La période d’exception qu’il va observer les prochains mois et années doit être mise à profit pour poser de façon définitive les bases d’une démocratie constructive.
Pour cela, on doit se poser la question fondamentale de savoir :
De quoi souffre la Guinée ?
On pourrait reprendre ici les maux cités par le Colonel Mamady Doumbouya le jour de sa prise du pouvoir. A mon humble avis, ces maux, comme bien d’autres, sont ponctuels et circonstanciels. Mais au regard de l’expérience vécue ces trente dernières années, il va sans dire que l’ethnocentrisme est le piédestal sur lequel ont été bâtis les partis qui ont jusqu’ici animé la vie politique du pays. C’est le fléau qui a toujours empêché et qui, s’il n’est extirpé jusqu’à la racine, continuera à empêcher le développement et la cohésion sociale du pays. Le mal c’est qu’il somnole en chacun de nous, gagne de plus en plus les générations montantes et représente une véritable bombe à retardement, un volcan en ébullition qui peut entrer en effusion à chaque échéance électorale. La démarche qui est proposée ici pour le combattre, ou tout au moins le contourner, se veut simple, compréhensible même pour un Guinéen analphabète, parce que pédagogique. C’est pourquoi je la présente en français facile, car une importante frange de la population guinéenne comprend mais ne sait pas lire la langue de Molière. De sorte que, si quelqu’un lisait cette démarche devant des gens, elle soit compréhensible pour cette frange.
Rappelons tout d’abord qu’en règle générale, et ce depuis la révolution française de 1789 qui a consacré la D E M O C R A T I E, la gouvernance de tout pays fonde son programme sur l’une ou l’autre de deux doctrines en présence:
Celle de gauche ou celle de droite.
Entre les deux, le centre qui n’est pas une doctrine, mais une perception plus ou moins modérée de l’une ou l’autre de ces doctrines.
Les extrêmes, comme l’excès en toute chose, sont à bannir, mais elles doivent être, d’une façon ou d’une autre, intégrées dans la pédagogie à mettre en œuvre pour faciliter la compréhension. En principe, chacune des deux doctrines possède sa propre idéologie qui se situe fondamentalement à l’antipode de celle de l’autre.
Dans l’exercice de la démocratie, un mot retient l’attention : ALTERNANCE !
Compris et considéré dans le sens de la doctrine, ce mot qui revient comme un leitmotiv, conserve toute son importance.
Or force est de constater qu’en Afrique en général et en Guinée en particulier, les appartenances politiques ne sont pas doctrinales, mais communautaires.
Chez nous, quand un citoyen fonde un parti, il compte d’abord sur son ethnie. Au premier tour d’une élection, comme c’est la cohue, tout peut bien se passer. Dès qu’il reste deux candidats pour le second tour, le plus souvent, de latent, l’argument communautaire subjectif, devient patent.
Dans ce cas, concrètement et objectivement, quelqu’un peut-il nous dire quel sens peut avoir le mot A L T E R N A N C E ? Un danger
C’est pourquoi l’éducation idéologique de la population me paraît être une nécessité absolue. Mettons-nous-y et prenons le temps qu’il faut pour la faire. Ainsi, chaque citoyen saura que le critère doctrinal est le seul qui compte pour un choix politique, ce qui nous mettra à l’abri de ce dangereux fléau qu’est l’ethnocentrisme. Grâce au développement des moyens de communication en vogue, notamment des nouvelles technologies de l’information, nous disposons aujourd’hui de tout l’arsenal requis pour parvenir, en un temps record, à inculquer cette notion de doctrine.
A ce sujet, le facteur très important sur lequel il convient d’insister, c’est le rôle des media, notamment des journalistes.
En 2018, les élections communales guinéennes m’ont trouvé malade, alité. A défaut de pouvoir marcher, j’avais donc tout le temps de suivre les émissions interactives diffusées sur les ondes des radios et télévisions de la place. Jusque-là, ma tension artérielle était habituellement soit normale, soit en-dessous de la normale, mais jamais au-dessus. Malheureusement pour moi, ces élections étaient concomitantes avec la grève des enseignants, mais ce qui me dérangeait davantage sur mon lit de malade, c’étaient les commentaires distillés sur ces antennes. Consciemment ou inconsciemment, tous les journalistes parlaient d’«élections communautaires» au lieu de c o m m u n a l e s, ce qui contribuait à élever la tension dans les esprits.
Il conviendra donc de discipliner et de cadrer les commentaires des hommes de media.
Après cette mise en garde, je vais en venir à la stratégie.
Pour la rendre actuelle, et en dépit de la différence de contextes, je vais la présenter telle qu’en 2008, quand l’armée avait pris le pouvoir à travers Dadis Camara, puis Sékouba Konaté.
Voici la démarche :
1- Demander que chaque parti politique dépose devant le CNT qui sera bientôt mis en place, une copie de son projet de société en 45 exemplaires. Durée à déterminer.
A ce niveau, il existe déjà un nombre connu de partis politiques légalement enregistrés avec leurs projets de sociétés. N’empêche que ceux qui voudraient en créer de nouveaux pourront le faire dans le même délai, pour respecter le caractère inclusif du processus ;
2- Constituer une commission qui sera essentiellement composée de professeurs d’économie politique de compétence avérée, pour la lecture de tous les projets de société, et demander à cette commission de les classer par ordre doctrinal, ce qui nous donnera trois groupes doctrinaux. Durée à déterminer.
A ce niveau également, peu importe si de nouveaux rapprochements sont établis entre leaders de partis pour des raisons ou d’autres, pourvu qu’ils ne soient pas noués sur des considérations ethniques. D’aucuns seraient tentés de me dire qu’au jour d’aujourd’hui, les alliances politiques sont déjà tissées, et que cette démarche ne s’avère plus appropriée. Mais objectivement, qui peut nous garantir que ces alliances ne sont pas tissées autour d’intérêts égoïstes qui ne tiennent aucun compte de l’aspect doctrinal ?
Pendant ce temps, la Commission Electorale Nationale Indépendante sera mise en place, composée des représentants des autres entités déjà existantes et d’un nombre égal de représentants de chaque groupe doctrinal, puis on procèdera au nettoyage et à la mise à jour du fichier électoral. Des débats seront ouverts autour de la nécessité de retenir deux ou trois doctrines. Durée à déterminer
3- Demander à chaque groupe doctrinal de prendre tout son temps pour désigner un seul leader, ce qui devra infailliblement déboucher sur des élections primaires de base assorties de campagnes électorales et de débats télévisés, et à des tenues de conventions. Durée : un an.
Avantage : on n’aura que deux ou trois candidats pour l’élection présidentielle (selon le nombre qui aura été retenu après débats), candidats élus non pas sur la base du critère communautaire, mais du critère doctrinal
4- Organiser les élections présidentielle et législatives sur la même base doctrinale et non communautaire : Durée : un an
Pour accompagner toutes ces étapes, mes chers frères et sœurs, un travail colossal sera nécessaire à la base, travail sans lequel toute cette démarche sera nulle et non avenue. Pour cela il faudra judicieusement choisir encore une crème de professeurs d’économie politique, toujours de compétence avérée, qui vont préparer et présenter aux organes de la transition un programme d’éducation-sensibilisation de la population. Après approbation, ce programme sera distribué à toutes les stations de radio et à toutes les chaînes de télévision et déroulé non seulement en français, mais aussi dans les différentes langues nationales, pour expliquer aux populations ce que c’est qu’une doctrine politique et surtout son contenu, et combien de doctrines politiques exercent le pouvoir dans le monde. Ainsi, tout sera fait de sorte que chacun sache où se situe son intérêt et, le jour du vote, fasse son choix conséquemment au moment de glisser son bulletin dans l’urne, choix qui ne tiendra plus compte du critère communautaire, mais du critère doctrinal.
Imaginez, mes chers frères et sœurs, que pendant tout ce temps, ce programme soit intégré aux cours dans toutes les écoles et universités, avec une intensité convenue des spécialistes de l’éducation pour chaque niveau; imaginez que, pour sa mise en œuvre, on puisse monter des scénettes éducatives et utiliser des outils audio-visuels même dans les districts ; qu’au lieu de fermer les bureaux et les ateliers pour plusieurs jours de campagne politique, les ressortissants des différentes régions de l’intérieur, chaque fois qu’ils iront dans leurs villages, soient mis à contribution pour expliquer aux parents ces différentes doctrines.
Admettez que la mise en œuvre de cette stratégie n’enfreindra nullement pas les nombreuses réformes auxquelles va s’atteler la transition sur tous les plans : administratif, institutionnel, constitutionnel, etc… Aussi, pendant tout ce temps, le pouvoir ne sera dérangé ni dans la réalisation de ses programmes prioritaires de développement à l’intérieur du pays, ni dans ses efforts pour assurer le rayonnement de sa diplomatie à l’extérieur. Bien au contraire, il aura surtout la main libre pour jouer le rôle d’arbitre qui lui revient et n’hésitera pas à brandir des cartons, rouges, jaunes ou verts selon les cas. Un leader politique qui, pendant sa campagne, tiendra par exemple des propos ethnocentriques, sera purement et simplement disqualifié. Par contre, celui dont les efforts de rassemblement des populations autour d’un idéal d’intérêt public s’avèreront évidents, méritera un satisfecit.
Voilà, présentée en peu de mots, la stratégie certes très artisanale, mais en même temps empirique qui, depuis longtemps me taraude l’esprit et que je soumets à votre sagacité intellectuelle, le seul objectif étant de contourner le carcan ethnocentrique que je considère comme le mal des maux de notre chère Guinée. Car, ne nous fions pas au calme apparent du moment, la situation sera tout autre dès que les échéances électorales se présenteront, et personne ne pourra alors juguler les velléités qui vont se présenter. La démocratie va se muer en D é m o nc r a t i e avec son corollaire de violences et de cruauté.
Comme vous pouvez aisément le constater, mon approche n’est centrée que sur la recomposition de l’espace politique du pays sur des bases démocratiques objectives, car c’est bien la politique et rien que la politique qui a contribué à diviser le Guinéens. Quant aux nombreux autres secteurs pour lesquels les spécialistes sont légion, le moment venu, chacun essaiera d’apporter son grain de sel là où il pourra. Pour le moment, je vous invite à accorder la priorité à la résolution de cette équation qui me paraît primordiale pour l’avenir du pays.
Je n’ai fait qu’imaginer cette stratégie, nous allons la mûrir ensemble. Comme toute idée, elle ne manquera pas de zones d’ombre. Je me tiens donc à la disposition de tous pour répondre à toute question qui nécessitera un éclaircissement, même s’il faut le faire sur les ondes des média, et je demande l’appui de ceux qui pourraient y adhérer et qui ne manqueront pas de l’enrichir. Si elle retient votre sagace attention, je m’en réjouirai. Dans le cas contraire, je me résignerai, convaincu que l’avenir finira toujours par juger.
C’est le lieu de m’adresser à tous les partenaires au développement de la Guinée et à la communauté internationale.
Pour reprendre les termes de celui qui vient de prendre les rênes du pouvoir et qui focalise aujourd’hui l’attention de tous et de chacun, la Guinée est « au tournant de son histoire, elle n’a pas droit à l’erreur ». Pas « à un tournant », mais « au tournant » a-t-il dit, et à juste raison.
Autrement dit, la course dans laquelle le pays s’engage est une course de fond et non une course de vitesse. Qu’on ne mette donc pas la pression sur la junte cette fois-ci, comme ce fut le cas quand Dadis Camara, en 2008, avait dit qu’il aurait remis le pouvoir aux civiles en 2010. Tout le monde avait trouvé ce délai trop long et crié au voleur, mais malgré l’implication de cette communauté internationale, ce fut bien en 2010 que les élections avaient finalement eu lieu. Si on avait pris Dadis au mot, que ceux qu’on appelle cette fois-ci encore « les Forces Vives » l’avaient compris, accompagné et aidé à faire un chronogramme cohérent débouchant sur des élections démocratiques en 2010, imaginez l’économie qu’on aurait faite. Au contraire, l’appétit que nourrissaient ces forces vives pour le pouvoir avait pris le dessus et entraîné tout le monde dans le forcing qui a eu pour conséquences les évènements fâcheux et regrettables du 28 septembre 2009 et l’attentat qui s’en était suivi
Cette fois-ci, au tournant de l’histoire de la Guinée, les sages du pays demandent humblement à tous ses partenaires au développement et à la communauté internationale, de se joindre aux efforts de cette nouvelle équipe qui, d’ailleurs, se veut inclusive, pour remettre la démocratie guinéenne sur les rails en créant les conditions pérennes de développement et d’épanouissement total du pays sur la véritable base démocratique qu’est l’alternance au pouvoir, gage de paix et de stabilité.
Que représentent trois (3) ans à l’échelle de la vie d’un pays ? Nous les sages qui faisons cette proposition, beaucoup d’entre nous sont au crépuscule de leur vie et ne rêvent pas de voir se réaliser cet idéal aujourd’hui convoité. Mais en tant que croyants, nous sommes certains que cela contribuera au repos de l’âme de ceux qui ne seront plus là
Encore une fois, patience. Nous invitons tout le monde à la patience. Evitons la précipitation, posons et consolidons les vraies bases d’une véritable démocratie fondée sur les idéaux de paix, de cohésion sociale et de stabilité du pays.
Qu’ALLAH Tout-Puissant bénisse la Guinée et les Guinéens. Amen !
Conakry, le 15 Septembre 2021
Fara Ibrahima MONGONO
Géologue à la retraite
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