Les nouveaux témoins dont la liste a été rendue public en fin de week-end par le Parquet ont entamé leur déposition devant le tribunal criminel statuant dans le dossier des massacres du 28 septembre 2009. Et pour ouvrir cet autre épisode, Tibou Kamara secrétaire général à la présidence chargé de la communication au moment des faits.
L’ancien ministre conseiller personnel d’Alpha Condé a axé son témoignage sur trois étapes. D’abord le voyage de Labé. Ensuite, le fameux échange téléphonique entre le président Dadis et Sidya Touré leader l’UFR et, enfin la date fatidique du 28 septembre.
Voyage de Labé
Dans sa déposition, Tibou Kamara déclare avoir échangé avec le capitaine sur les bien-fondés de ce voyage dans une zone jugée hostile au pouvoir du CNDD. “Le président Dadis en réponse m’a fait comprendre qu’il n’est pas président d’une seule partie de la Guinée. Et aussi, qu’on ne peut l’interdire d’aller dans une partie du territoire national. Enfin, qu’il a été invité par les sages du Fouta donc il se devait d’y répondre” a-t-il égréné comme raisons qui ont motivé le président Dadis à effectuer ce voyage qui s’est d’ailleurs, témoigne Tibou, très bien passé dans la ferveur et dans la joie.
Appel téléphonique Dadis – Sydia
Ainsi, de retour de ce voyage éclair sur Labé à la station où on s’était garé, poursuit Tibou Kamara, j’en ai profité pour discuter avec le Général Sekouba Konaté sur l’épreuve de force qui se dessinait avec les forces vives d’alors à quelques heures de leurs manifestations. “Le Général Sekouba m’a dit d’aller en discuter avec le président Dadis parce que c’est moi et lui qui sommes politiques mais qu’il est prêt à me soutenir dans mon approche quand Dadis va l’en parler. C’est alors j’ai brièvement échangé avec le président Dadis mais j’avoue franchement qu’il m’a fait savoir son incompréhension sur les raisons de ces manifestations car il était à tout moment en contact on peut dire fraternel avec ces leaders politiques….”
Lorsque nous sommes rentrés à Conakry, fatigué par l’élan du voyage, poursuit le témoin, “J’ai continué directement à la maison et à peine rentré le président Dadis m’a rappelé de venir rapidement au camp”. Une fois arrivé, on a reparlé de nos échanges de Labé et il m’a dit d’appeler l’ancien premier ministre Sidya Touré avec pour objectif de trouver un accord de report de la manifestation pour raison de la date historique du 28 septembre ou de changer le lieu, a-t-il déclaré. “Lors ce cet échange entre le président Dadis et Sidya il y avait un climat très apaisé entre les deux hommes. Quand l’appel a été interrompu, le président m’a dit de rappeler encore. Ce que j’ai fait et dans les mêmes conditions les deux ont échangé sans aucune tension autour du report de la manifestation et la délocalisation au stade de Nongo sans gain de cause avant que la ligne ne se coupe pour la seconde fois. Il m’en a fait la demande de rappeler mais cette fois le numéro ne passait plus. On a essayé les autres leaders en vain, comme par coïncidence aucun numéro ne passait” confesse Tibou avant de quitter le président Dadis.
28 septembre, jour de manifestations et la répression
Ainsi, a-t-il renchéri, le 28 septembre jour de manifestations “moi je suis resté à la maison et c’est à travers les appels et les médias qu’il y a tragédie…Lorsque je suis arrivé au camp Alpha Yaya Diallo, j’ai trouvé le capitaine Dadis assis dans un couloir les mains sur la tête. Lorsque je suis rentré il m’a vu comme ça et s’est écrié : Tibou tu as vu ce qu’on m’a fait ? Est-ce que tu as vu ce qu’on m’a fait ? J’étais un peu surpris parce que c’était une de rares de fois où je l’ai vu dans une position de faiblesse (…) Lorsqu’il est entré dans son bureau, les premières explications étaient en train d’être données sur le déroulement et le film de la journée. Ce que j’ai entendu la plupart disait au capitaine que les victimes l’ont été par bousculade. Lorsque j’ai entendu cela, j’ai dit spontanément peut-être imprudemment que non ! M. le président il y a d’autres aussi qu’on dit avoir été tués par balle. Il a sursauté de son fauteuil par balle ! Mais on m’a dit que c’est par bousculade. En retour, j’ai dit que je n’étais pas présent, je ne suis pas témoin mais c’est une piste à explorer compte tenu de l’ampleur du drame”
Suivront les questions des parties au procès